ANFORM MARTINIQUE N105

novembre - décembre 2022 • anform ! 57 © TWINDESIGN D ébut juillet 2022, des chercheurs mar- tiniquais révèlent les dangers de l’hydro- gène sulfuré pour les femmes enceintes : “Outre les facteurs de risques traditionnels, l'exposition environnementale aux échouages de sargasses pourrait potentiel- lement déclencher l'apparition précoce de la pré-éclampsie.” Cette pathologie provoque, entre autres, une élévation de la pres- sion artérielle mettant en danger la femme enceinte comme le fœtus. De quoi inquiéter, vu les nombreux échouages aux Antilles. CAUSALITÉ NON ÉTABLIE Sylvia, une femme enceinte de 34 ans, résidant à moins de 2 km du littoral, a cru devoir déménager. “Ça sentait fort les sargasses chez moi. Mais après une discussion avec un médecin, j’ai relativisé” , raconte cette Guadeloupéenne. Les premiers articles publiés dans la presse sont alarmistes. Mais l’étude, dont l’auteur princi- ••• pal est le Dr Donatien Bahezre de Lanlay, n’en est qu’à ses débuts. Dans leur analyse publiée dans la revue Environmental Toxi- cology and Pharmacology, les chercheurs s’expriment d’ailleurs au conditionnel. Et le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et la Direction générale de la sécu- rité émettent quelques réserves : “Conclusion très prudente, causa- lité non établie, interrogation sur le choix du modèle statistique, absence de données sur la repré- sentativité de l’échantillon.” À défaut de constantes sur le taux d’hydrogène sulfuré dans l’air, les chercheurs se sont en effet basés sur “une notion de dis- tance” , explique un des auteurs, le Dr Rémi Nevière du Centre hospitalier universitaire de Mar- tinique. L’exposition à la toxicité des sargasses reste donc relative. L’analyse porte sur 3 020 femmes enceintes entre 2016 à 2020, dont 653 seulement vivent à moins de 2 km des côtes. Parmi elles, 6,4 % ont déclenché une pré- éclampsie. “Un pourcentage faible de complication, et tant mieux !” , commente le Dr Rémi Nevière, qui alerte cependant “sur l’appa- rition précoce de pré-éclampsies lorsque la femme est exposée aux sargasses échouées sur la plage, ce qui vient accentuer les risques de condition de naissance préma- turée”. PRESSION ARTÉRIELLE Si ces résultats préliminaires ne doivent pas affoler, ils peuvent cependant inciter à considérer les émanations de sargasses comme étant un potentiel facteur de risque de la pré-éclampsie, en plus du diabète, de l’âge et de l’hypertension. Autrement dit, les chercheurs invitent les “femmes enceintes qui auraient déjà du diabète ou de l’hypertension, avec une moyenne d’âge de 29 ans et plus, à être encore plus attentives si elles sont exposées au gaz qui s’échappe des sargasses en putréfaction, l’hydrogène sulfuré” .

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